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Le conte de toutes les dualitésL’écrivain vaudois imagine un monde de bonimenteurs, un monstre hermaphrodite, le tout à la fin du XVe siècle. Pour mieux s’interroger sur le désir et l’attirance des sexes. Récipiendaire de Fin XVe, alors que l’on s’apprête à découvrir l’Amérique, un homme nommé Hardouin s’arrête un soir dans une grange, quelque part en France. Il y choisit un enfant orphelin, Tiécelin, l’habille, le soigne et l’emmène. Pour lui proposer d’être son assistant. C’est que Hardouin est un bonimenteur, allant de foires en places publiques pour montrer sa «chose», un corps hermaphrodite conservé dans de l’eau-de-vie. On commence à subodorer que l’entreprise romanesque d’Olivier Sillig va virer au subtil jeu de pistes. D’autant que vont surgir une jeune aveugle qui sait tout du monde, un délicat chevalier défiguré, et que nous seront contées les histoires du premier assistant d’Hardouin, leurs amours charnelles, et celle de l’hermaphrodite, imaginée dans une Venise carnavalesque... Où tout est dualité Au-delà de cette débauche narrative qui se lit avec un plaisir sensuel, Olivier Sillig a mis en place tout un système de dualités. L’aveugle qui seule comprend ce qui se passe autour d’elle en est un exemple patent. Le symbole de l’hermaphrodite fonctionne au centre de ce système comme une interrogation centrale du récit: qu’en est-il de nos désirs, de notre attirance pour un sexe ou pour l’autre? Ainsi dans l’histoire fabulée de cette «chose», Olivier Sillig réussit habilement à imaginer une danse macabre du désir d’un corps pour le féminin et le masculin. Accentuant sa réflexion, il souligne en passant que si Hardouin a été amoureux de son ancien assistant, ses émois homoérotiques n’ont rien à voir avec de la pédophilie, puisque le jeune Tiécelin, 7 ans au début du récit, n’est pas objet de désir, mais bien plutôt d’une sorte d’amour paternel. D’ailleurs, en développant son conte essentiellement du point de vue de Tiécelin, Olivier Sillig construit lentement une transmutation. Ou comment un gamin qui dans les premières pages du livre n’attendait que la mort dans le froid et le dénuement va connaître un parcours étonnant, quelques révélations, et devra se déterminer sur ses penchants amoureux. La «cire perdue», nous rappelle-t-on en exergue, est un procédé consistant à mouler de l’argile autour d’un modèle en cire, qui fond lorsqu’on coule le métal dans le moule. C’est donc bien le thème de la transmutation qui court tout au long du récit. Mais on dira surtout que La cire perdue est un conte profondément humain. On saisit assez vite comment Olivier Sillig a moulé son argile romanesque autour du questionnement central de l’identité sexuelle et du désir. Cire thématique sur laquelle il déverse le métal de la réflexion et de l’introspection pour mieux brûler quelques clichés tenaces. Une joyeuse hallucination Mais il faut aussi souligner que JACQUES STERCHI, |
Olivier Sillig / olivier.sillig@perso.ch / (21) 320 33 22
V: 25.06.2009 (25.06.2009)