La Gruyère, Charly Veuthey, 16 juillet 2009
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LivreFantaisie médiévaleOlivier Sillig suit, au cœur du Moyen Age, un saltimbanque qui gagne sa vie en présentant au public un hermaphrodite conservé dans un bocal d’eau-de-vie.La cire perdue, qui vient de paraître chez Bernard
Campiche Editeur, est le sixième roman d’Olivier Sillig, auteur
installé à Lausanne et âgé de 58 ans. Ce livre, qui mêle allégrement
les genres, est séduisant, même s’il explore parfois des mondes
troubles.
L’histoire est pour le moins singulière. Hardouin,
un saltimbanque, sauve la vie d’un enfant qui va mourir avec 24 autres.
Il l’emmène sur les routes pour en faire son assistant. Agé de 7 ans,
Tiécelin va apprendre le métier de bateleur pour aider Hardouin à
attirer le public des villes et des foires vers une attraction pour le
moins étonnante: Hardouin et Tiécelin présentent au public «La Chose»,
un herma-phrodite adolescent enfermé dans un bocal d’eau-de-vie.
Au fil des pages, le lecteur ira, selon les
pérégrinations du duo, de surprise en surprise. La petite histoire se
mêle à la grande lorsque le premier assistant de Hardouin, Juan,
s’engage comme mousse, en 1492, sur les bateaux de Christophe Colomb.
Une étonnante galerie de portraits parsème également le texte: la
chiromancienne Grand Macabre, le mongolien Face-de-Lune, Ava la jeune
aveugle ou Carolingine la tortue… Au final, la petite bande s’élargit
et c’est une tribu qui tient de la cour des miracles qui marche sur les
routes médiévales.
Les choses se mêlent dans ce roman, sans qu’on
sache toujours où l’auteur veut nous conduire. Les thématiques
centrales du livre – à l’exception certainement de celle de la
pendaison – pourraient s’exprimer aussi bien dans un contexte
contemporain, car le Moyen Age de ces pages, sans jugement de valeur,
est parfois de pacotille. On y sent un auteur qui a eu du plaisir à se
plonger dans cette époque et qui ne s’est pas gêné de l’exploiter pour
ses visées romanesques: «Quand j’ai démarré le livre, je me suis acheté
un dictionnaire du Moyen Age et ensuite j’ai beaucoup utilisé
Wikipédia, en croisant avec le dictionnaire pour m’assurer des
informations.» Une auberge espagnole Le point fort du livre tient dans la relation
entre Hardouin et ses deux assistants dont il devient en quelque sorte
le père. Mais cette belle image est parfois troublée par les soucis
rencontrés par Hardouin qui craint d’aimer trop Juan, son «fils»
spirituel, lequel découvre au fil des pages qu’il partage avec Hardouin
une attirance vers les êtres du même sexe.
Olivier Sillig explique que «beaucoup de mes
romans tournent autour de l’identité sexuelle. Et là, je voulais
aborder un thème qui nous interpelle tous, celui de la pédophilie.»
Mais il ne faut pas trop compter sur l’auteur pour
l’auto-analyse de ses romans, il se dit peu compétent pour l’exercice.
Lorsqu’on lui demande si son livre est historique, ou fantastique, il
répond: «En tout cas pas historique, à mon avis un peu fantastique.
Mais je suis toujours en bordure de tous les genres.» Quant au pourquoi
de la figure centrale de cet hermaphrodite médiéval? «Quand j’écris, je
ne m’occupe pas trop des thèmes.» Autant dire qu’il faudra vous faire
une idée personnelle du roman: «Peut-être que mes bouquins, ce sont des
auberges espagnoles.» Une chose est certaine, dit-il, «je ne me censure
pas, même si ce roman est moins dégueulasse que d’autres que j’ai
écrits». Déconcertant Comme on peut s’y attendre au vu de ce qui
précède, l’homme Olivier Sillig est déconcertant et peu conventionnel.
Il a étudié un peu la psychologie – «une erreur de jeunesse» –
travaillé plusieurs années dans l’informatique – «ça c’était bien» – et
beaucoup créé: «C’est décidément quand je fais de la création – même la
cuisine – que je suis heureux.» Après avoir peint, «sans aimer la
nécessité de commercialiser les œuvres», fait du cinéma, «mais c’est
laborieux», construit avec passion des petits bateaux et s’être obstiné
à faire des croquis, il s’est lancé dans l’écriture: «Il a fallu du
temps avant que je sois publié. Je ne savais pas si mon premier livre
était lisible, j’ai fait sept ans avant de le publier.»
Ce premier roman, Bzjeurd, une œuvre de
science-fiction, a connu un succès qui a permis à Olivier Sillig d’être
publié dans la collection Folio science-fiction. Aujourd’hui, il a le
sentiment que, «c’est romancier que j’aime le mieux être, que j’aime le
mieux faire et c’est ça que je fais le mieux. J’ai plein de romans en
stock.» Mais il ne se contente pas de ce seul art: il vient de réaliser
un nouveau projet pour le cinéma et il se fait aussi connaître dans le
monde du slam, dans le canton de Vaud, sous le nom de 512.
Il semble que sa vie ne supporte ni le vide ni
l’ennui, il essaie de faire en sorte que ses romans n’en apportent pas
non plus à ses lecteurs: «J’écris avec un petit lecteur en peluche sur
mes épaules et je fais en sorte de ne pas l’ennuyer.» Charly Veuthey, 16 juillet 2009 |
Olivier Sillig / olivier.sillig@perso.ch / (21) 320 33 22
V: 06.08.2009 (06.08.2009)