Olivier Sillig

 Bzjeurd

Pequeños extracto traducido y publicado en:    ¿Qué hay de nuevo en literatura : 101 publicaciones recientes de la Suiza latina

Resumen

De regreso a su casa iras un año de compañerismo, Dzjeuraf encuentra su pueblo destruido y todos los habitantes asesina­dos. Siguiendo la pista de los criminales, se dirige a Kazerm, una tenebrosa fortaleza en la que sólo habitan soldados, escla­vos y putas.



Para descubrir su secreto, tendrá que salir vencedor de duelos singulares y convertirse en asesino, perdiendo tal vez en ello su propia alma. Pero es el precio de la venganza...
De vez en cuando, pocas veces solo, ven al que llaman el Oficial. Va vestido como los demás, pero por el orillo de su chaqueta gris corre una doble cinta, naranja y azul. Lleva siempre guantes negros. A menudo, cuando pasa, barre con la palma de la mano un pedazo de mesa y se sienta con la punta de la nalga, como si debiera marcharse enseguida. Su mirada parece distraída, sin embargo es evidente que lo observa y lo capta todo. Rostro y edad banales, nada que le distinga de los demás soldados, salvo su mirada. Es la mirada de algunas águi­las. Sus pupilas son amarillas y fijas, penetrantes para hip­notizar a los ratones. Se evita hablar de él. Pero cierta vez, en cuanto se ha marchado, Arengo cuenta una antigua leyenda del Sur. La del Flautista de Hameln. En tiempos de las ciudades, con su flauta, había embrujado primero las ratas que habían invadido Hameln, luego, cuando le nega­ron la recompensa, a los hijos de los burgueses. Atraídos por su música, los niños habían acudido y habían seguido al extraño flautista que se los había llevado fuera de la ciu­dad. La fuerza que ejerce aquí ese oficial es idéntica. Hay que esforzarse para no seguirle. Bzjeurd se sorprende tem­blando.

La carne llega cada día, flotando a grandes pedazos sanguinolentos en la carretilla; los habitantes de los limbos no la comen casi nunca. A veces, los caracoles que se crían bajo las freseras de las zanjas. Más raramente, lam­preas pescadas cuando suben a la superficie del limo para respirar; las recogen con un ruido de succión. Si alguna fiesta coincide con la fortuna de un cazador, se come por fin carne, la carne blanca y azucarada de los frailecillos atrapados cuando se hartaban, también, de lampreas. Raros son, en los limbos, quienes han probado la carne roja. Los caballos son demasiado valiosos como montu­ras, las burras como lecheras, algunos pollinos tal vez, en ocasiones excepcionales. Entonces, aquellos grandes pedazos muy rojos, de fibra muy visible, cada vez más numerosos en la soja y que tienden a convertirse en el ali­mento de base, trastornan el régimen y las costumbres de los hombres. Hasta aquí, para la mayoría, la carne nunca había sido más que un recuerdo de velada, recuerdo de esas historias que se cuentan junto al fuego y evocan leja­nas fiestas de los tiempos de las ciudades, de las magnífi­cas bodas en las que el héroe recompensado se convierte, por muchos años, en presidente de la república, tras increíbles festines donde las viandas se preparan de mil y una maneras.
Sus olores cambian, sus excrementos se hacen negros y, aunque ociosos, sienten que se vuelven más vivos.
La carne se hace cruda. Cada vez la cortan peor. Ya sólo les sirven carne y todos la comen, pero nadie habla de ello. Nadie quiere conocer su procedencia. Se han vuelto carní­voros, se sienten feroces. Privados, desde hace más de un mes, de las mujeres que les concedían, hasta ahora, cada semana, excitados por ese nuevo alimento que creen ver correr por sus azuladas venas, inactivos, sienten nacer en su interior increíbles tensiones.
[...] Capítulo 4: Primer Círculo, p. 47.
De temps en temps, rarement seul, on voit celui qu’on appelle l’Officier. Il est habillé comme les autres, mais sur le fil de sa veste grise court un double soufflet, orange et bleu. Il porte toujours des gants noirs. Souvent, quand il passe, il balaye du plat de la main un bout de table et s’assied d’un coin de fesse, comme s’il devait repartir aussitôt. Son regard semble distrait, pourtant à l’évidence il observe et enregistre tout. Visage et âge quelconques, rien qui le distingue des autres soldats, sauf son regard. C’est le regard de certains aigles. Leurs pupilles sont jaunes et fixes, perçantes pour hypnotiser les souris. On évite de parler de lui. Mais une fois, aussitôt après son départ, Arengo raconte une vieille légende du Sud. Celle du Joueur de Harmlinn. Au temps des villes, avec sa flûte, il avait d’abord ensorcelé les rats qui avaient envahi Harmlinn, puis, comme on lui refusait sa récompense, les enfants des bourgeois. Attirés par sa musique, les enfants étaient accourus et avaient suivi cet étrange musicien qui les avait alors entraînés hors de la ville. La force qu’exerce ici cet officier est identique. Il faut lutter pour ne pas le suivre. Bzjeurd se surprend à frissonner.
 
La viande. Elle arrive tous les jours, flottant en gros morceaux saignants dans le brouet.
Les habitants des limbes n’en mangent presque jamais. Quelquefois les escargots qui prospèrent sous les fraisiers des jeunes drains. Plus rarement des lamproies pêchées quand elles remontent à la surface du limon pour respirer; on les cueille dans un bruit de succion. Si une fête coïncide avec la fortune d’un chasseur, on mange enfin de la viande, la viande blanche et sucrée des pouffins attrapés alors qu’ils se gavaient eux-mêmes de lamproies. Dans les limbes, très rares sont ceux qui ont goûté à la viande rouge, les chevaux sont trop précieux comme montures, les ânesses comme laitières. Quelques ânons peut-être, dans des occasions exceptionnelles. Alors ces gros morceaux bien rouges, à la fibre bien visible, de plus en plus nombreux dans le soya et qui tendent à devenir la nourriture de base, bouleversent le régime et les habitudes des hommes. Jusqu’ici, pour la plupart, la viande n’a jamais été qu’un souvenir de veillée, souvenir de ces histoires racontées au coin du feu qui évoquent des fêtes lointaines du temps des villes, des mariages magnifiques où le héros récompensé devient président de république pour de longues années, après des festins incroyables où les mets sont apprêtés de mille et une manières.
Leurs odeurs changent, leurs excréments deviennent noirs et, bien qu’oisifs, ils se sentent devenir plus vifs.
La viande se fait crue. Elle est taillée toujours plus grossièrement. On ne leur sert plus que de la viande et chacun la mange, mais personne n’en parle. Personne n’en veut connaître la provenance. Ils sont devenus carnivores, ils se sentent carnassiers. Privés depuis plus d’un mois des femmes qu’on leur octroyait jusque-là chaque semaine, excités par cette nourriture nouvelle qu’ils croient voir courir dans leurs veines bleutées, inactifs, ils sentent naître en eux des tensions incroyables.
[... ] Chapitre 4: Premier Cercle, p 47.

 

 


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V: 26.11.2007 (V1: 26-11-07)